+ Cinéma le Rex au 43, rue Nationale à Tours (37000)
Valérie Lagrange : merci les « Ruts » !…
Moi j’avais bien aimé Valérie Lagrange dans un film de cape et d’épée vu au Palace dans les années 60 et quelques. I! me semble que Gérard Barray, le bretteur le plus sexy du cinéma français en ce temps-là, était de la partie. Ou alors je confonds… Enfin bref : au Rex lundi soir, la belle Valérie m’attendait, entourée d’une bande de spadassins qui avaient troqué la lame contre la gibson, le grand chapeau à plumes style Pardaillan contre la casquette de cuir ou le feutre mou façon Madness
et les bonnes manières du gentilhomme contre les vociférations made in England.
Les « Ruts » derrière, Valérie devant : aïe aïe aïe ! Ça allait faire mal ! Reconvertie au rock, prêtresse du reggae « depuis 73, j’étais branchée dessus… » qu’elle disait dans sa biographie), décidée à damer le pion à ses consœurs, l’ancienne actrice allait-elle pourfendre son public (venu remplir une bonne demi salle) d’une botte de Nevers aussi secrète que meurtrière ? Eh bien non ! En deux heures de spectacle,
Valérie Lagrange a seulement réussi à convaincre son ancien admirateur du cinoche du jeudi après-midi qu’elle aurait mieux fait de ne pas s’aventurer sur les terres brûlantes du rock et de laisser ça à d’autres, plus aguerries, plus mordantes, plus « bêtes de scène ».
Des textes fleurant bon la Bibliothèque rose de la révolte post soixante-huitarde, une présence pas évidente du tout, un registre de voix qui, à l’écouter de près, faisait presque regretter Mama Béa ou la Fabienne de Shakin Street: Valérie Lagrange avait décidément peu d’atouts dans sa manche ce soir-la.
Heureusement, le gang qu’elle avait amené avec elle faisait oublier les lacunes de sa prestation. Bons les « Ruts » ! Très bons même ! La preuve : quand la vedette s’effaçait pour leur laisser la place, les kids et les kidettes étaient pris d’envies de se trémousser qui laissaient augurer de ce qu’aurait pu être… un concert des « Ruts ». Avec Valérie au tambourin par exemple…
Pierre IMBERT. Nouvelles Républiques du 18/11/1981